Tambours (brèves de lecture)

 

"Ah ! mes amis, quel sacré tambour, oui ! Tambour qui d'abord faisait mine d'être assoupi tel un animal venant de mettre bas, qui bougonnait au-dessus de la crête ronde des buissons, et puis, Bondieu-Seigneur! En un rien de temps, tambour qui levait une chaleur toride - Dou-gou-dou-gou-doom ! - sautant, éructant et déparlant sous les doigts ensorcelés du maître du rythme"

Raphaël CONFIANT, La lessive du diable, Ecriture, 2000. p. 14.

"Le chant des tambours est une histoire de gestes, d'intentions, de perception de l'espace"

Sylvain SICLIER, Le Monde, 25 août 2000.

"Ne cherchez pas à jouer comme un Africain, pas même comme un Blanc, jouez comme vous êtes"

Adama DRAME, live à la Salle Paul Fort, Talensac, Nantes, le 18 avril 2000.

"L'idée, c'était de mettre un contre-temps comme un temps fort et au bout d'un moment, on ne sait plus où est le temps, le contre-temps. C'est un placement spécial et je crois que le mystère, il n'y a que ceux qui le jouent qui le percent"

Christion VANDER, La Griffe, n° 99, 13 décembre 2000.

"Plus on joue moins vite, et moins on frappe doucement" (propos apocryphes de G.H. rapportés à la louche par O.C. le 14 janvier 2001, bref une info de première bourre, de seconde main à interpréter au troisième degré)

"Le chant n'était plus qu'un hurlement généal et les tambouriers, roulant inlassablement du mouvement enragé et invisible de leurs mains, se perdirent dans le déchaînement du bruit (...) Le rythme et la danse sont probablement, de loin, le besoin le plus pressant de l'organisme du Noir dans son état primitif. C'est un exutoire sans lequel sa vie même paraît menacée. Cela fait des millénaires que le roulement des tambours conditionne son être entier et le tambourineurs savent d'expérience - c'est devenu une tradition instictive - quelle mesure, quel tempo, quelle hauteur de son et quel volume de tambours régit les centres moteurs et sensibles du danseur"

Patrick LEIGH FERMOR, Vents alizés, 1950, Traduction 1993 Payot Voyageurs.

"Le son du tambour dissipe les pensées ; c'est pour cela même que cet instrument est éminemment militaire" Joseph JOUBERT

"Tambour loin a joli son" proverbe créole

"Quand la danse est finie, le tambour est toujours lourd" proverbe créole

"On n'attrape pas un lièvre avec un tambour" proverbe auvergnat

"Ce qui vient de la flûte retourne au tambour" maxime de la Renaissance

"Tambour lointain n'a pas de son" proverbe créole

"La voix du peuple est le tambour de Dieu" proverbe urdu

" Le cri de détresse d'un seul gouverné ne vient pas à bout du tambour" proverbe africain

"Quand les tambours battent pour la fête, veille à ce que tes baguetttes ne soient pas molles" proverbe maori

" Au régiment, si par hasard vous êtes tambour, même sur l'ordre du colonel, ne vous avisez jamais de battre la générale" Erik SATIE

"Les tambours changent de baguettes" proverbe rwandais

"Celui qui est près du tambour n'en perçoit pas les sons" proverbe bamiléké

"Si un homme ne marche pas au pas de ses camarades, c'est qu'il entend le son d'un autre tambour" Henri David THOREAU

"Quand on invite un tambour, on doit suppoter ses bruits" : proverbe dahoméen signifiant qu'il faut se résigner aux conséquences de ses actes, cité par Jean PLIYA, Manuel de Cours moyens - "Histoire Dahomey, Afrique Occidental" conforme aux programmes officiels, 1970.

"Blanc, sucre et guitare ; Noir, tabac et tambour" Fernando ORTIZ
"Tambour? L'instrument primitif et de prédilection des nègres" Dr Friedrich RATZEL (1844 - 1904)

"La musique afro-américaine a révolutionné les solutionneurs de cloches, la musique écrite flippe dans sa crypte, le scatrap des tambours du bourg de bouche reste louche" Bernard LUBAT, in Jazz en suite, Editions du Garde-Temps, novembre 2000

"On se demandera si le plaisir de battre un tambour est né du besoin, non de marquer seulement le rythme, mais de participer encore de quelque manière à la gesticulation générale. Taper sur le premier objet venu, chaudron, pot de terre ou tronc d'arbre, c'est répondre autant à un réflexe de danseur qu'à un geste d'instrumentiste. Mutuelle réaction du rythme de la danse sur la percussion et de celle-ci sur celui-là : l'un ne cessant de provoquer l'autre, qui s'en trouve serré de plus près"

André SCHAEFFNER, Le jazz, Editions Jean-Michel Place, 1988

"Autour de la ville (Bangoro), je vis quelques ronniers très élevés et plusieurs palmiers. Les femmes vinrent, dans la soirée, sur la place du marché ; elles étaient au nombre d'une centaine, ayant chacune un pagne blanc à la ceinture seulement ; elles étaient coiffées d'un petit chapeau de paille rond qui leur tombait un peu sur l'oreille. Plusieurs tenaient à la main un tambour de basque fait d'une callebasse recouverte en cuir de mouton tanné : ces tambours étaient ornées de boucles de fer qui faisaient entendre un bruit agréable ; elles chantaient d'une voix sonore des airs sauvages, et sautaient toutes ensemble en cadence, en agitant leurs tambours (...) Je vis plusieurs hommes qui marchaient avec de grosses caisse qu'ils frappaient, et d'autres femmes ayant un tambour suspendu au cou, à l'extrémité duquel était une petite planche couverte de sonnettes et de morceaux de fer qui s'agitaient et résonnaient par contrecoup ; ce qui produisait un assez bel effet" (chapitre XV, janvier 1828)

René CAILLE, Journal d'un voyage à Tonbouctou et à Jenné, dans l'Afrique Centrale, précédé d'observations faites chez les Maures Braknas, les Nalous et autres peuples pendant les année 1824, 1825, 1826, 1827 et 1828, Paris, Imprimerie Royale, 1830

"Avec n'importe quel objet, les longs doigts secs (du nègre de Cuba) trouvent le moyen de produire des sons inattendus, discrets ou violents, tranchants ou sourds, doux ou cruels. Le bois, le métal, la terre cuite, la peau très desséchée, lui offrent une gamme inépuisable de timbres savoureux dont ils extrait une véritable orchestration de bruits. Les Cubains ont découvert, surtout, une certaine qualité de bois qui produit le son clair et métallique d'une enclume (les claves). Ils en tirent des notes qui ont la pureté lumineuse et mélancolique du chant nocturne du crapaud. Ajoutez-y une suite de chuchotements mystérieux produits par des frictions, des bourdonnements et des percussions, des chocs de la paume de la main et des phalanges contre de menues timbales, les frottements d'une baguette sur des calebasses évidées, et la palpitation de soie que produisent des centaines de petites pierres ou de graines dans un fruit sec. On obtient ainsi une orchestration très proche de la vie, qui semble être le consentement universel des choses au rythme de la danse "

Emile VUILLERMOZ rapporté par Alejo CARPENTIER, La musique à Cuba, Gallimard, 1985 (première édition en espagnol " La Musica en Cuba " parue au Mexique en 1946)

"Au sein de la cohue dansaient les tambouriers, d'aucuns avec des tam-tams en bandoulière, d'autres avançant à la manière de sauterelles en serrant leurs instruments entre leurs genoux pliés. Des troupes de Noirs portaient sur l'épaule des tambours de dix pieds de long : des cylindres pareils aux tambours assotos des forêts haïtiennes, creusés dans les fûts de grands arbres. Hissés à bout de bras au-dessus de la tête des danseurs, les tambouriers accroupis chevauchaient ces grands instruments tels de jockeys démoniaques, battant frénétiquement de leurs paumes la membrane des tambours (...) Cette prodigieuse conga n'avait rien de frivole ni de carnavalesque. Ce mélange de danse, de symboles et de chants était, par sa nature, un abrégé de l'histoire et des révoltes des Noirs, mais aussi de la complainte de l'Afrique en même temps qu'une apocalyptique allusion voilée au vaudou, aux obis, à Cambois, Schango, Nanigo, Los Santos, Batonga-Naroca, Candomble, Caboclo, Ubanda, à la macumba et à la wanga, comme à tous les cultes nègres secrets des Amériques ; et l'admiration que forçaient la précision et l'abandon de la danse, mais aussi le volume somptueux du chant et de la musique des tambours, se mêlait intimement d'effroi"

Patrick LEIGH FERMOR, Vents alizés, 1950, Traduction 1993 Payot Voyageurs

" Ne soyez pas les mendiants de l'Univers quand les tambours établissent le dénouement"

Edouard GLISSANT, cité par J. BARNABE, Patrick CHAMOISEAU et Raphaël CONFIANT in Eloge de la créolité (In praise of creoleness), Gallimard, NRF, 1989

"C'est pourquoi (...) il clôturait les portes et les fenêtres de son atelier et se mettait à jouer du tambour avec une virulence de nègre de Guinée. Les sons lourds du rythme du laghia enrageaient ainsi d'être emprisonnés et rugissaient à faire vibrer toutes les cloisons des maisonnettes de environs"

Raphaël CONFIANT, Eau de café, Grasset, Paris, 1991

"... car il n'est de vrai jazz que si ça swingue. Et les joueurs de conga, de bongo, les percussionnistes de toutes espèces en connaissent les sortilèges"

Franck TENOT, préface de Latin Jazz, Isabelle LEYMARIE, Edition Vade Retro, 1998, CD joint en association avec Jazz Magazine

"Raisonner comme un tambour" locution figurée attestée dès 1872 par jeu de mot avec "résonner comme un tambour" et faisant office de pléonasme au sein de la section rythmique des Chapalleros.

Alain REY (sous la direction de), Le Robert Dictionnaire historique de la langue française, tome III, Paris, 1998

" Il sera très peu aisé pour le non-musicien de comprendre la complexité et la difficulté (...) des rythmes africains. Peut-être que la meilleure façon de se faire une idée est d'essayer de taper du pied deux fois alors que les mains tapent trois coups, tout ceci simultanément (...) Mais maintenant tout en gardant le rythme régulier, essayer de diviser chaque battement de la main en deux ou trois ou tentez de diviser quelques uns de ces battements de main parfois en deux et parfois en trois ou encore de la syncopéer. (...) Eventuellement le rythme de base deviendra même "silencieux" - non énoncé mais implicitement ressenti par la foule et les instrumenetistes - tout comme nous pouvons sentir la pulsation d'une mélodie sans pour autant marquer le temps avec le pied"

James Lincoln COLLIER, L'aventure du jazz, des origines aux swing, volume I, Albin Michel, 1981

"Ecoute New York ! Ô écoute ta voix mâle de cuivre ta voix vibrante de hautbois, l'angoisse bouchée de tes larmes tomber en gros caillots de sang Ecoute au loin battre ton coeur nocturne rythme et sang du tam-tam, tam-tam sang et tam-tam"

" Les tam-tams, dans les plaines noyées, rythment ton chant, et ton vers est la respiration de la nuit et de la mer lointaine (...) Tu cueillais une étoile au firmament pour la rime, Rythmique à contre-temps"

Léopold Sedar SENGHOR, "A New York" et "Lettre à un poète" in Ethiopiques

"Tambours et clairons ont comme des sons railleurs / De ne plus avoir un écho pour leur répondre" Paul VERLAINE, Epigrammes, 1894

"Ce qui caractérise la civilisation africaine est en effet l'importance primordiale du rythme. On ne le découvre pas seulement dans ses danses ou sa musique, martelée par les atabaques, les tam-tam, les instruments de percussion, les secousses, les battements de mains ou de pieds, mais aussi dans sa plastique, à travers la répétition des mêmes motifs ornementaux, le refus d'imiter le réel, les déformations de la nature, en somme, le dessin devenant leitmotiv, dans la sculpture qui est une danse de volumes, et dans l'architecture qui est une composition musicale.

Ce rythme esthétique reflète le double rythme de la nature et de la société"

Roger BASTIDE, Images du Nordeste mystique en noir et blanc, Pandora, 1978 et Editions Acte Sud, collection Babel, n° 154, 1995

" Pendant longtemps, le jeune Balthazar Bodule-Jules ne regarda que les tambouyés. Il était fasciné par cette technique qui semblait être une fièvre. C'était un vrai souffle de dragon qui vous prenait le corps et l'entraînait dans des grappes d'émotions. Cela pouvait aller de l'apaisement subit à la violence extrême. Déjà en fureur permanente, il sentait combien son coeur s'accélérait sous l'effet des coups sourds, et combien l'envie de se battre lui venait quand les tambouyés accentuaient certains rythmes. Ils entraient dans des cassures brûtales qui le poussaient en dehors de lui-même. Il ne savait pas encore qu'il rencontrerait le tambour dans tous les coins du monde où il lèverait ses armes. Qu'il les verrait creusés dans des os de toutes formes, montés dans des poteries, sortis de troncs creusés, sculptés dans des boiseries ou des métaux de lune. Ils surgiraient( partout, dans les naissances, les morts, les joies et les malheurs, ils accompagneraient les tueries et les guerres, les paix et les mystères. En bien des nuits (...) il entendrait dans une coulée de vent l'invocation obscure d'un tambour rebelle"

Patrick CHAMOISEAU, Biblique des derniers gestes, NRF, Gallimard, 2002

"L'art abstrait a fait éclater la peinture : quand en musique, on fait éclater les formes il ne reste que les percussions, au désavantage de l'harmonie" Serge Gainsbourg

" Quand nous étions enfants, Victor Hugo était un grand maître du tam-tam" Léopold SEDAR SENGHOR, extrait de "Les Hôtes de passage" in La corde et la souris par A. Malraux, Folio, Gallimard (entretien de 1966)

"C'est un besoin naturel qui est là en permanence, comme la terre qui est naturellement sous nos pieds. Pour vivre nous avons besoin de l'air que nous respirons et du sol sur lequel nous marchons. La clave vient naturellement au sein de toute composition, comme le sol sous nos pieds"

Eddie PALMIERI

"La fin du carnaval coïncida avec la dernière nuit de notre séjour cubain. Nous nous frayâmes un passage à travers la populace agglutinée de part et d'autre du Prado (...) une sonorité africaine vint alors nous frapper les oreilles : le fracas et le grondement des tam-tams, les saccades sternutatoires des cha-chas et le grattement des plectres sur des gourdes rainurées ; et, une fois encore, dans le sillage d'une forêt de lampions, escortée par les flammes des torches, une interminable horde de Noirs ordonnée descendait l'artère d'un pas dansant. Ils se balançaient d'un pas d'avance et de recul au rythme de l'authentique danse nègre de Cuba : la conga. Ils arrivaient par centaines mais chaque danseur évoluait seul : trois pas glissants à gauche, suivis d'un arrêt brutal marqué par une espèce de hoquet chorégraphique sur une demi-mesure, puis trois pas à droite (crash!) et de nouveau trois pas à gauche tandis que tous les instruments barbares marquaient le rythme"

Patrick Leigh Fermor, Vents alizés, Payot, Voyageurs,1950

"Exù n'est cependant pas le seul intermédiaire entre les hommes et les dieux. Les trois tambours du candomblé le sont aussi ; le rum qui est le plus grand, le rumpi qui a la taille moyenne et le lè qui est le plus petit. C'est que ce ne sont pas des tambours ordinaires ou, comme on le dit là-bas, des tambours "païens" ; ils ont été baptisés en présence de leur parrain et de leur marraine, aspergés d'eau bénite prise à l'église, ils ont reçu un nom, et le cierge allumé devant eux s'est consumé jusqu'à la fin. Surtout, ils ont "mangé" et ils "mangent" chaque année le sang d'une poule (on ne leur offre jamais des "bêtes à quatre pieds"), dont le babalorixà a arraché la tête sur le corps incliné de l'instrument, de l'huile de palme, du miel et de l'eau bénite. Ensuite "la tête, les intestins, les ailes et les pattes sont cuits dans de l'huile de palme, avec des crevettes et des oignons, mais sans sel", et ce plat est déposé, avec d'autres aliments, devant les tambours où ils resteront tout un jour, pour qu'ils aient le temps suffisant de les "manger". On comprend qu'ainsi ces instruments aient quelque chose de divin, qu'on ne puisse ni les vendre, ni les prêter sans des cérémonies spéciales de désacralisation ou de resacralisation, et ce qui nous intéresse ici, qu'ils soient aptes, par leur seule musique, de faire descendre les dieux dans la chair de leurs fidèles"

Roger BASTIDE, Le candomblé de Bahia : transe et possession du rite du Candomblé (Brésil), Plon, 2000 (Première édition : 1958)

"Ici on est tous percussionniste, et ceux qui ne le sont pas professionnellement paraissent presque être les meilleurs. Ils possèdent cette légèreté de frappe qui est si rare (...) C'est si subtil, si détendu et en même temps ça a tellement de force" (Joachim COODER)

"L'Amérique, c'est une lente découverte de l'Afrique par les tambours"

Minino GARAY, Le Monde, 26 juillet 2002

"Le plus grand tambour batà, celui qui occupe le centre du trio, est dénommé iyà. C'est comme on le dit vulgairement, "la mère des tambours". Ce tambour a une curieuse particularité : dans l'orchestre composé des trois batà, l'iyà est celui qui émet la note la plus aiguë quand on frappe sa plus petite peau, et la note la plus grave quand c'est la plus grande. Le tambour iyà doit être joué par l'olori le plus expérimenté des trois qui composent l'orchestre. Ses mains se livrent à une prodigieuse virtuosité de rythmes et de tonalités. Tandis que la main droite forme un capricieux fond de rythmes arabesques sur la peau la plus grave, la main gauche qui frappe la peau la plus aiguë tire du tambour le langage magique provoquant l'euphorie dyonisiaque, la possession mystique et l'illusion du contact avec les dieux, et qui de tout temps et de toutes les races, a toujours été le délire de dépassement, d'évasion hypnotique, l'espoir consolateur et l'impuissante résignation" (...) Les trois tambours "parlent en langue" et profitant des multiples tonalités des mots qui sont caractéristiques des langues à tons parlées par tous les peuples d'Afrique qui ont été amenés à Cuba, les batà s'expriment en langue lucumi. Et leurs notes, comme des syllabes tirées de la peau vibratile des tambours, sortent non pas à l'unisson, ni à la hâte, mais en ordre les unes après les autres, comme des sons en séries qui forment les mots" (...) En réalité,, ce sont les tambours, surtout l'iyà, qui parlent, qui organisent et qui défient les chanteurs, qui ne font que les accompagner de leurs voix. On dirait que ce sont les tambours qui chantent et que les chanteurs les accompagnent"

Fernando ORTIZ, "La musique sacrée des Noirs Yorubas à Cuba" in Ultra, juillet 1937, vol. III, n° 13, pp. 77-86

"Dans le domaine de la percussion, (...) l'exécutant doit avoir du sentiment pour savoir faire passer son imagination avec un instrument aussi limité" (Amadito VALDES)

Wim et Donato COODER, Buena Vista Social Club, Nathan, janvier 2000

"The guys that play this music the best, I'm telling you, are the guys that really know how to phrase in clave (...) It takes years just to stop being terorized by the clave (...) It's sophisticated rhythmically, but also in terms of harmony, orchestration, arrangement"

Wynton MARSIALIS, The New York Times, Sunday, october 27, and Monday, october 28, 2002

" Les musiques africianes ne sont pas de simples cacophonies de bruits, comme le prétendent ceux qui sont aveuglés par leurs préjugés contre les Noirs, mais de complexes combinaisons esthétiques de sons, de tons, de timbres, de rythmes, de mélodies, d'harmonies, de chants et de danses, de valeur universelle et universalisable "

Fernando ORTIZ, "Los bailes y el teatro de los negros en el folklore de Cuba", 1951

" Disons avant tout que les Noirs ont leur propre musique. Cela semble une vulgaire lapalissade : cependant il faut le répéter, car certains affirment encore que les Noirs ne font pas de musique mais du bruit : ceux-là, pleins de vacuité présomptueuse, ignorent le trame mélique des rythmes qui surgissent de leurs tambours, et la beauté de leurs mélodies, presque toujurs chantées "

Fernando ORTIZ, "La musica sacrada de los negros yorubas en Cuba", in Ultra, juillet 1937, volume III

"La célébration de ces cérémonies débute toujours par un appel rythmé aux divinités. Les tambours y jouent un rôle essentiel : ils sont pour les Noirs beaucoup plus que de simples instruments musicaux servant à accompagner des chants et des danses religieuses ; ils sont tenus pour des êtres doués d'une âme et d'une personnalité ; ils sont baptisés et il faut, de temps à autre, leur infuser une force nouvelle par des offrandes et des sacrifices (...) Ce sont des instruments sacrés ; s'ils tombent par accident au cours d'une cérémone, celle-ci peut être suspendue momentanément. Ils ne peuvent être joués par nimporte qui et, seuls les joueurs de tamabours attitrés, liés à eux et ayant subi une initiation, ont le droit de les faire résonner les jours de fête. Les tambours parlent, car les modulations que leur impriment les joueurs suivent celles des langues à accentuation tonique très marquée, parlées dans ces régions d'Afrique"

Pierre Fatumbi VERGER, Dieux d'Afrique, 1954, réédition 1995 par Revue Noire

" Un captif s'empara de la baguette du tambour de guerre. Il commança à battre le tam-tam en une succession de coups forts et saccadés. Le tambour vomit avc rage ses notes d'alarme ; le vent les emporta et l'écho les répandit partout aux alentours "

Amadou HAMPATE-BA, Oui, mon commandant !, (Mémoires - II), Acte Sud, Babel, 1994

" Tandis que je jouissais du spectacle et de la tiédeur de l'air, après le froid nocturne de Ngaoundéré, des roulements assourdis de tambours, venant de la montagne, se firent entendre. Une fois encore, je me sentis tel l'homme blanc typique sorti d'un de ces films au ton âpre que produisaient les studios britanniques dans les années quarante. Il écoutait le tam-tam des indigènes cachés dans la montagne en se demandant si c'était le signal du massacre "

Nigel BARLEY, Un anthropologue en déroute, 1983

" Paradoxalement, sur une auto, vous avez des freins à tambour, alors que sur un tambour, vous n'avez pas d'auto-frein " Raymond DEVOS

" Le tam-tam ni la voix ne rythment plus les gestes des saisons "

Léopold SEDAR SENGHOR, extrait de " Chaka "

"Quand le tambour frappe, on ne se proclame pas meilleur danseur, on le prouve "

Amadou KOUROUMA, En attendant le vote des bêtes sauvages, 1999

"La clameur secouait les plaques de fonte du pavillon d'un frisson sonore de tam-tam"

Emile ZOLA, Le ventre de Paris, 1873

" C'est le son de Bahia ? Non, c'est le son de la citoyenneté" (publicité de Petrobras, la compagnie pétrolière brésilienne où l'on voit des tambourinaires jouer et répondre à la question d'une jeune femme)

" Après la fête, les tambours sont lourds " intervention en créole d'un diplomate américain à Haïti, Le Monde, 9 janvier 2004

"Le murmure du vent s'approchait rapide. En première ligne, on pouvait distinguer une sorte de plainte assoupie (...) on y distinguait comme des roulements d'une multitude de tambours, une note impétueuse et mauvaise, et le chant d'une foule en marche"

Joseph CONRAD, Typhon, Gallimard, 1918

"Puis il (Marche-à-terre) frappa fortement le sol en jetant le pesant manche de son fouet aux pieds du commandant. L'impression produite sur les spectateurs de cette scène par la harangue laconique de l'inconnu resemblait à celle que donnerait un coup de tam-tam au milieu d'une musique"

Honoré de Balzac, Les Chouans, Le Livre de Poche, p. 18

" Le tambour en bandoulière, Ti-Comique tape comme un chien enragé. Tout en marchant. Tout en dansant. Ti-Comique joue. Ti-Comique tape sur son maman-tambour. La sueur lui baigne le visage. Lui coule sur la poitrine (...) L'espace d'un instant, Ti-Comique, que toutes les familles bien-pensantes du quartier prennent pour un malandrin, se transforme en roi. Roi du tambour, king of the bongo. Joue pour moi, Mister Tambourine Man. Tue en moi le virus de l'innocence.

A vrai dire, le tambour t'a toujours fasciné. L'idée qu'on peut tirer des sons aussi endiablé d'une simple peau de cabri tendue sur un tronc creux reste u nmystère pour moi (...) Tu te hisses dessus. tes doigts effleurent de nouveau les flancs, puis le rebord. (...) Un bon batteur, dit-on, peut se faire entendre aisément outre-océan. Etablir un dialogue profond avec ceux de la Martinique. De Cuba. De la Louisiane. Du Brésil. De la Jamaïque. Même de Guinée. Il suffit de frapper. Et la Guadelope répond. Pak. Pitakpitak. Pak. Pitakpitak. Pak. Pitakpitak. Pak. "

David DAMOISON & Philippe DALEMBERT, Vodou ! Un tambour pour les anges, Autrement, 2003, collection Monde - Photographies

" Tonbouctou (...) La nuit venue, la lune reflétant sa demi-calebasse dans un fleuve d'argent oxydé, ridé par l'activité ds insectes, les aigrettes blanches perchées dans les acacias, le martèlement d'un tam-tam en ville, le son d'un rire spontané s'élevant comme de l'eau pure, les grenouilles taureaux, les moustiques geignards qui vous empêchent de dormir et, du côté du désert, les lointains hurlements des chacals ou les aboiements des chiens de garde des camps nomades "

Bruce CHATWIN, " Horreur du domicile" (1970), in Anatomie de l'errance, Grasset

" De la coupe des cannes à la grage du manioc en passant par la lutte, la danse ou même la pêche à la senne, à l'époque rien ne pouvait se faire sans la bénédiction d'un tambour, les paroles d'un chant "
" Tout le temps, la musique est là. Envahissante, chaude, sensuelle, elle fait rugir les tambours, tressauter les clarinettes, virevolter les mandolines ou les guitares. Notre vie au fond n'est plus que musique"
Rolan BRIVAL, Biguine Blues, Phébus, 1999
Raphaël CONFIANT, Chimère d'En-Ville, Ramsay, 1997

 

" Ces danses ne rappelaient en rien les nobles figures du passe-pied ou du menuet, sans aller cependant jusqu'au paroxysme des déhanchements et des grands écarts en honneur dans les bals musettes des banlieues parisiennes. Au total, il se faisait plus de grimaces que de contorsions, et aussi plus de culbutes. en un mot, dans ces attitudes chorégraphiques, on retrouvait moins l'homme que le singe (...) En outre, les danses ne s'exécutaient pas avec accompagnement des clameurs publiques. C'était au son d'instruments des plus rudimentaires, calebasses tendues d'une peau sonore et frappées à coups redoublés (...) Jamais charivari plus assourdissant ne déchira des oreilles de blancs ! (...) Un silence absolu succéda aux bruyantes démonstrations, au fracas assourdissant des tam-tams, au sifflet suraigu des flûtes "

Jules VERNE, Le village aérien, 1901

" Mais le jour des obsèques un joyeux tumulte de tambours emplit la ville. Les nègres, sachant fort bien qu'il y avait en France quelque chose dechangé, avaient pensé, quoique tardivement, à célébrer leur carnaval d'Épiphanie, oublié pendant les années d'athéisme officiel. Dès la première heure ils s'étaient déguisés en rois et en reines d'Afrique, en diables, en sorciers, en généraux et en bouffons, se précipitant dans les rues munis de calebasses, de sonnailles, de tout ce qui pouvait être percuté, secoué, en l'honneur de Melchior, de Gaspard et de Baltazar "

" En ce moment même les gens de couleur de Bahia faisaient retentir de nouveaux tambours, ceux de la "Rébellion des Tailleurs" qui réclamaient sur un rythme de macumba l'égalité et la fraternité : ainsi les tambours-Djuka se joignaient-ils à la révolution française elle-même"

Alejo CARPENTIER, Le siècle des Lumières (El siglo de las Luces), Mexico, 1962

(...) tam-tams qui protégez mes trois âmes mon cerveau mon coeur mon foie

tam-tams durs qui très haut maintenez ma demeure de vent d'étoiles sur le roc foudroyé de ma tête noire

et Roi tam-tam frère pour qui il m'arrive de garder tout le long du jour un mot tout à tour chaud et frais de ma bouche comme le goût peu connu de la vengeance

tam-tam de Kalaari

tam-tam de Bonne-Espérance qui coiffez le cap de vos menaces

Ô tam-tam du Zululand

tam-tam de Chaka

tam, tam, tam,

tam, tam, tam (...)

Ex-voto pour un naufrage, in Cadastre, Seuil, 1961, in Anthologie poétique, Aimé CESAIRE

" Mais il se trouvait maintenant qu'Osain - dieu-au-pied-unique, seigneur des cyclones, génie de la rotation, de la danse giratoire, en une orbite qui allait des bouches du Mississippi aux bouches de l'Orénoque, s'était mis à danser, à danser, à danser, des rumbas, des congas, des sones, des calypsos, des contredanses créoles, entraînant le blues dans sa troupe endiablée ; et il s'était installé à Paris, à Londres, à Madrid, dans la fracas stimulant de sa batterie chtonienne. Derrière le drum de la Nouvelle-Orléans, étaient arrivés, en escadrons nourris, les claves et maracas, les tambours, timbales, calebasses, sonnailles, chachas, socs de charrues, econes, xylophones de Cuba (...) partout (ses) chanteurs et (ses) musiciens faiaient résonner des calebasses, des bois, des tambours, des cruches, des cylindres en fer-blanc, des peaux de boucs "

Alejo CARPENTIER, La danse sacrale, 1978 Siglo XXI Editores, 1980 Gallimard pour la traduction française

« Iya, Itontele, Okonkolo, ils étaient trois tambours bata, présentés pour la première fois au public en 1936 par Fernando Ortiz. Et ce jour là, ils dévoilèrent à Cuba la magie de leurs rythmes. Trois tambours, un grand, un moyen, un petit qui depuis des siècles, dans le secret des confréries et des maisons des Saints, invoquaient les dieux noirs venus d’Afrique »

in Cuba, " Merceditas Valdes y los tambores bata de Jesus Perez " (ASPIC), signé par Claire LAMBEA

" Monsieur Waloumba disait que le plus important était de faire beaucoup de tam-tam pour éloigner la mort qui devait déjà être là et qui avait une peur bleue des tam-tams, pour des raisons à elle. Les tambours sont des petits tambours qu'on frappe avec les mains et ça a duré toute la bruit "

Romain Gary (Émile Ajar), La vie devant soi, Folio, n° 1362, 1975

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